Monday, May 27, 2013

 

Unluckily too shallow to have any depth

CUT SLEEVE BOYS

A small film about gay Chinese men in London. That’s not an easy life and being gay in London, and I guess it is the same everywhere or in many places, is rather disappointing and offers flimsy security. The world outside is hostile, very hostile at times since some young men are so bored that hunting gays is a funny game and since they can’t hunt foxes any more they have to look for some substitute animals, and for them gays are just as good as any other game, and I do not mean a card game, rather some living creature that is assimilated to a boar or a hare. And that can be a hairy bore in a way.

The fact that the main characters are of Chinese origin does not change anything in the story. In fact it does not even make it deeper or more profound since there is absolutely no trace of racism in the film. The fate of gays in London is shallow and cruel especially when they are young and when they do not want to get attached, probably their Buddhist heritage, but more probably the freedom they want to keep against all odds because they were clandestine for so many centuries that they can’t even think of being or going stable which would mean telling everyone including their own parents they are gay. Somewhere they see their parents suddenly hit by nightmares about what they may or may not do in bed with their alter egos.


So they live on the side of real humanity. They make believe everyone and themselves they are happy with a one night flimsy superficial sex episode that they call making love though it is nothing and there is no real love in this quick rapid short episode, nothing but pretending. And they kick the transient visitor out or they kick themselves out with the fair intention that it was one time and there will be no second. It is sad, very sad, even painful to see them smile and laugh in a life that is nothing but a dream of a life, in fact a nightmare of a real life.

At the very end the director maybe insinuates that maybe perhaps there might be some further developments, a second night after the first, but under duress. That is still not a life. That is still not human. Man, just like women, needs stability and continuity, flexible and fluid adaptability but within some stable frame. Changing sexual partner every night, or even twice a night is not exactly psychologically viable. But some pretend, and that pretension is very emotionally expensive, that it is the basic condition for their happiness and they forget that one day they won’t be beautiful any more, they won’t be young any more, they won’t be desirable any more, they won’t find any real satisfaction in internet pornography any more, if ever, when they won’t find partners any more.


I find the film rather sad though we could consider it as a warning. But there is little effectiveness in giving a warning to the Titanic; It is bound to sink. Or it has to be redesigned completely.


Dr Jacques COULARDEAU



Saturday, May 25, 2013

 

Pas si simple d'être philosophe juive dans le monde de 1961.

LA TACHE EICHMANN À LA BANNIÈRE SIONISTE.

Il est intéressant de se tourner vers cette intellectuelle juive réfugiée à New York dans une université américaine et qui enseigne la philosophie qu’elle a étudiée avec Martin Heidegger, un philosophe intéressant qui n’a pas su, ni voulu j’imagine, prendre ses distances d’avec Hitler et s’est laissé sans résistance récupérer par le national socialisme. Hannah Arendt, juive allemande, réfugiée en France dans les années 1930 mais raflée par les Français en 1940, a réussi à fuir et échapper à la déportation grâce à un visa américain arrivé miraculeusement pour elle et son mari. Le film ne montre que peu de la jeunesse de cette femme, quelques souvenirs d’étudiante, sa liaison avec Heidegger dans l’entre-deux-guerres, et quelques vagues souvenirs pas toujours très clairs et très fragmentaires sur la période nazie. Il eût été intéressant d’en montrer plus.

Le film se concentre sur la courte période du procès d’Eichmann en Israël en 1961 qu’elle couvre pour le New Yorker, à sa propre demande. Plutôt que de couvrir de façon factuelle ce procès, elle en fait une longue réflexion philosophique qui l’amène à parler de choses apparues dans le procès mais qui vont soulever une vraie campagne de haine et même de rétorsion.


Essayant de comprendre Eichmann elle réfléchit sur ce que l’on doit retenir contre un homme qui a commis des actes criminels. Non pas le système qui le manipule, mais sa réelle responsabilité alors qu’il n’a fait qu’obéir à des ordres. Elle défend la thèse qu’il a perdu, en n’étant qu’un bureaucrate obéissant, sa capacité à penser, à discriminer le bien du mal. Il s’est interdit – mais elle va plus loin en affirmant qu’il a perdu et non abandonné – sa qualité d’homme et donc sa responsabilité pour les actes criminels qu’il commet sur ordre. Elle s’oppose à la peine capitale, ce qui en son temps est courageux, mais elle semble blanchir cet homme qui a dirigé Auschwitz avec une efficacité phénoménale. Mais puisqu’il ne faisait que suivre des ordres, ce n’était pas lui le diable mais il n’était que le pion du diable. Comme Corneille le dit si bien : « Que voulez-vous qu’il fît ? Qu’il mourût. » Mais cette hypothèse est exclue pour ce fonctionnaire dans la logique de Hannah Arendt, bien qu’il se soit arrangé à prendre la fuite avant d’être arrêté par les alliés, ou plutôt les Russes qui ne prenaient pratiquement plus de prisonniers à ce moment là, en 1945. Comme quoi il savait qu’il commettait des crimes.

Mais elle révèle quelque chose qui à l’époque fit très mal : le fait que les Juifs étaient très organisés en Europe et que les dirigeants des communautés juives collaborèrent pour que la déportation et donc l’extermination, se fassent dans le plus grand ordre possible et non dans le chaos anarchiste que cela aurait été sans eux. Elle les accuse donc d’avoir collaboré à l’extermination des Juifs. Mais le film hélas est silencieux sur les détails. C’est donc une accusation en l’air. La réalisatrice aurait été plus pertinente, j’entends le film aurait été plus pertinent, si elle avait dit par exemple le fait que les trains de la déportation étaient payés par les Juifs eux-mêmes qui payaient donc leur propre déportation. La communauté juive de Bordeaux paya pour les trains de Papon fournis par la SNCF de l’époque. Des faits de ce genre ne furent possibles que parce que les édiles de la communauté juive organisa cela pour éviter le pillage et la souffrance du chaos. Treblinka avait un orchestre juif qui jouait pour les fêtes juives et les moments festifs des « hôtes juifs » du camp.


Cela n’efface pas les réactions scandaleusement sectaires, sinon même extrémistes et intégristes, des universitaires Américains autour d’elle, des Juifs sionistes d’Israël, qui passent aux menaces, au chantage, à la vendetta y compris administrative et universitaire. Le film, d’un autre côté, montre en vis à vis de quatre ou cinq universitaires hostiles un amphithéâtre d’étudiants très favorables et unanimement favorables, ce qui semble excessif dans ce sens aussi : il ne pouvait pas y avoir une telle unanimité et les étudiants hostiles ne pouvaient pas avoir été tenus – par qui ? – à l’écart de cet amphithéâtre.

Autant ce qu’elle a dit sur les édiles juifs dans le cadre de la Shoah, avant, pendant et après celle-ci, est justifié mais manque d’éléments concrets dans le film, autant ce qu’elle dit sur Eichmann est pour le moins irresponsable car le plus servile de tous les fonctionnaires qui obéit à des ordres criminels est responsable de ses actes même commandés. La Charte Universelle des Droits de l’Homme reconnaît le droit pour chacun de refuser l’application d’un ordre qui va à l’encontre de ses convictions morales ou éthiques. On appelle cela l’objection de conscience, et avant 1945 le courage voulait que l’on dise non, que l’on prenne la fuite, que l’on passe dans la clandestinité ou la résistance, et au pire que l’on fasse ce que sa conscience dicte : « Que voulez-vous qu’il fît ? Qu’il mourût. » Ce serait trop facile autrement : on tue sur commande et c’est comme si on n’avait rien fait. Toutes les guerres donnent ce droit aux militaires mais à l’encontre d’autres militaires pas à l’encontre des civils.


Hannah Arendt errait dans une arrogance philosophique quand elle défendait le contraire et l’arrogance de ceux qui était de l’autre – ou plutôt des autres – bord(s) ne justifiait pas la sienne, même si cette arrogance administrative, sioniste, universitaire et d’autres encore n’avait et n’a toujours pas la moindre raison d’être, même si c’est un mal largement partagé par beaucoup de bureaucrates, d’universitaires, d’intellectuels, et bien sûr d’intégristes de quelque idéologie ou école que ce soit. Il est tellement plus simple pour un ministre de l’intérieur confronté à un mouvement de masse hostile d’interdire une manifestation ou de dissoudre une organisation alors qu’’il ne s’agit que d’une manifestation ou d’un mouvement qui déclare son hostilité à une mesure d’un gouvernement, ce qui est pour le moins le droit de chacun. Mais certains ne pensent pas comme cela dans leur arrogance du pouvoir : on a été élu sur un programme, donc on l’appliquera contre vent et marée, et « c’est bien à notre tour de profiter de notre majorité ». J’ai lu cela sur un débat sur Google+ depuis trois ou quatre jours concernant le mariage pour tous.

Le monde n’a vraiment pas tellement changé dans la tête de certains pour qui la politique est un jeu de pouvoir et non un travail de consensus.


Dr Jacques COULARDEAU 



Friday, May 24, 2013

 

Quelques nouvelles de la planète Coulardeau. News from the other side of the cosmos





UNE VASTE HISTOIRE PERSONNELLE

Il y a des années que je lis cette Apocalypse en anglais, en français, en vieil anglais même, et dans quelques autres langues. C’est pour moi le texte le plus mystérieux qui soit car il raconte une histoire très ancienne en l’habillant des couleurs de la prédiction.

Je vis dans le dragon autant que dans la bête. Je frémis avec les quatre chevaux et leurs cavaliers. Je tremble avec Babylone, cette pute céleste et divine, peut-être pas du dieu des Juifs ou des Chrétiens, mais d’un dieu quelque part dans une quelconque galaxie. Je halète au sort de la femme enceinte qui porte son destin, et le texte dit le nôtre aussi, entre ses mains, façon de parler.

J’ai demandé à bien des compositeurs de mettre cet oratorio en musique, mais ce fut toujours une œuvre trop importante. J’ai essayé avec Annunzio Coulardeau une production en direct, en live et en plain air à Olliergues, lui, assurant la sonorisation et une composition de musique concrète et électronique plus ou moins improvisée. La première moitié seulement a été produite dans ces conditions.

Certains tremblent à la religion, d’autre à la longueur, d’autres encore tremblent devant la palette de voix à réunir, produite, construire, gérer. Et que dire de la musique !

Kévin Thorez s’y est mis lentement et il aura fallu trois ans pour réussir l’enregistrement, la composition et le montage. Vous me direz si le texte en vaut la peine, et vous rechercherez l’enregistrement pour me dire ensuite si la musique emporte bien l’aventure vers une fin qui, loin d’être salvatrice, est en fait des plus dramatique, tragique, car on vous raconte ici la fin de l’humanité matérielle et sa simple survie virtuelle.

Mais est-ce aussi simple ? Rien n’est jamais aussi simple qu’on le voudrait…





  


    Je suis né dans les chambres de bonnes d'une maison Louis XV-XVI du Quai des Chartrons de Bordeaux, au 95, un numéro qui allait me coller à la peau sous toutes ses formes 95, 15, et autres multiples comme 45 puisque je suis né en 1945, bien que conçu dans le même lieu en juin 1944 alors que les Allemands faisaient sauter leurs arsenaux de Cenon avant de quitter Bordeaux désarmés sous la protection d'un représentant de la Préfecture de Bordeaux bien connu et de l'envoyé de de Gaulle futur maire de Bordeaux pendant de très nombreuses décennies.

            La famille avait quitté Bordeaux pour le Lot à l'arrivée des Allemands et sont rentrés après les trains de Papon. Vous pouvez imaginer pourquoi. Une grand-mère, morte en 1938 environ, heureusement, si on peut dire. Papon n'aurait pas pardonné. Je suis donc venu au monde dans les discussions et les débuts de longues procédures de collectage de témoignages de ces trains du diable autour du conseiller municipal Basile, dont peu doivent se souvenir, sauf Chaban Delmas s'il était encore des nôtres.
            Le reste n'est qu'une histoire de fils cadet (deuxième sur cinq enfants) d'une famille ouvrière dont le père était un peu trop militant, nous permettant de dire bonjour aux inspecteurs du chômage le matin en partant à l'école. La famille est depuis éparpillée partout en France. Je ne garde de ces longues années que des souvenirs de dignité plus ou moins bafouée et de lutte quotidienne pour être au-dessus du raz de marée social permanent des trente glorieuses qui n'avaient rien de glorieux avant 1968, année ou le SMIC paternel a été doublé. Et je travaille depuis 1961 .

«… Et la musique de tous les instants, de tous les moments, de toutes les minutes. 
Sans musique je ne vis point, je ne vois rien, je ne veux rien, je ne vaux rien ...»

            Le second souvenir est celui de l'appel des pays lointains: Angleterre, Congo Kinshasa, Allemagne (Est et Ouest), Congo-Brazzaville, Etats Unis (beaucoup), Canada, Belgique, Pays Bas, Ecosse, Irlande, Autriche, Sri Lanka, Suisse, toujours pour travailler de mineur de lignite à Borna en Allemagne de l'Est, à enseignant d'université en Californie, de traducteur volontaire à Genève ou Londres pour les Forums Sociaux et autres à enseignant de l'anglais du Bouddhisme dans un monastère Bouddhiste. Rien ne saurait m'empêcher de regarder le soleil en face. Les marges ne sont faites que pour être envahies et explorées et j'ai plus d'une marge dans ma poche, bien qu'aucune chambrière d'hôtel.

            Ecrire, lire en public, produire en radio, performer sur scène, écrire pour la scène, publier des milliers de pages et être publié dans le monde entier, et ce n'est jamais assez, assez loin, et assez long. Courir de spectacle en spectacle, théâtre, opéra, concert, festival, si je devais les compter il faudrait pendant toutes ces années compter des centaines et des centaines, peut-être un ou deux milliers. Depuis quelques années (2005)suis plus sélectif et surtout le DVD me donne accès à des choses que je ne pourrais de toutes façons pas voir à San Francisco, Paris, Berlin, Londres, Beijing (Pékin pour les Français), Tokyo ou je ne sais encore quelle Los Angeles.

Et la musique de tous les instants, de tous les moments, de toutes les minutes. Sans musique je ne vis point, je ne vois rien, je ne veux rien, je ne vaux rien. Un des fondateurs des radios libres avec Radio Quinquin en 1979 quand cela valait la prison, une pièce musicale dans le Nord Pas de Calais (Centre Dramatique National de Béthune) en 1986, une pièce de marionnettes entièrement chantée au Théâtre Louis Richard de Roubaix en 1994-95, d'innombrables performances de scène, petites scènes certes mais les petites tailles ne sont pas nécessairement les moins intéressantes. Quelques chansons dont Mary Go Round en 93-94 pour n'en citer qu'une.

            Ma langue maternelle est le Bordeluche, un dialecte créolisé de l'Occitan, j'ai appris le français à l'école et ne le possède toujours pas comme l'Académie Française le voudrait, et je n'en ai cure, ni curé d'ailleurs, ma langue préférée est l'anglais et ma langue romantique est l'allemand. J'ai juré ne jamais apprendre l'espagnol tant que Franco serait en vie. Quand il est mort c'était trop tard. L'esperanto est dans uen case quelque part, mi opinias. Je pratique une demi-douzaine de langues pour l'opéra et la musique classique, et ma dernière langue est lesumérien après le pali.

Je laisse le reste à google… (ce texte est en accès libre.)




Quai des Chartrons, 95
Jacques Coulardeau

C’était une maison de négriers au 18ème siècle, en pierre de taille de Saint Émilion – ou d’ailleurs peu importe – avec une cour intérieure et ses trois étages. Nous vivions au troisième, l’étage des domestiques des anciens négriers. Les esclaves, eux, étaient dans les longs couloirs et salles sans issues et donc sans lumière du rez-de-chaussée, derrière les lourdes grilles.

     Bien sûr en 1950 il n’y avait plus d’esclaves là et cette maison je ne m’en souviens que par ses deux hiatus avec le monde extérieur.

     Le matin quand je sortais par la grande porte de l’entrée, large comme un camion et haute comme une citerne, je sortais du silence des couloirs de pierre dans le fracas des quais.

     En fait deux fracas. Le fracas de ce côté des grilles du port et le fracas de l’autre côté des grilles du port, donc du port lui-même. De ce côté c’était le bruit insupportable des voitures, des camions et des bus sur des pavés aussi gros que des crânes d’enfants. Un vacarme assourdissant, étourdissant et pourtant enivrant.

     Et derrière celui-ci, le deuxième fracas du port était une vaste toile de fond. Le bruit des tracteurs, des camions, des 
clarks, des wagons, des grues aux bras gigantesques, et bien sûr le bruit des marchandises, des piles de planches, des barriques et des tonneaux, en bois ou en fer, que l’on roulait sur les camions, et bien d’autres bruits encore. Parfois quelques cris, quelques ordres, quelques appels.

     Je refermais la porte et le bruit disparaissait et c’était la peur, la crainte, l’espoir quand je l’ouvrais à nouveau et que je choppais une bouffée de ce bruit en pleine figure, en plein dans les dents. Ça c’était la vie. Un vacarme qui nous appelait et puis nous noyait, nous déglutait d’une seule bouchée.

     Et le soir quand je rentrais je sortais de ce vacarme et alors j’étais pris à la gorge par la déchirure des odeurs des deux couloirs. A gauche le couloir des négriers derrière ses grilles massives et qui maintenant hébergeait un chai industriel de vin de table, de Bordeaux bien sûr, mais de table quand même. Ce vin arrivait souvent en barriques, était conservé dans des cuves très loin dans le couloir, et repartait dans des citernes remplies avec une pompe et de gros tuyaux. Odeur du vin, mais aussi, certains jours de certains bisulfites ou autres qui « amélioraient » la qualité du vin. N’en doutez pas. C’était la norme alors. Nous n’avions pas l’Europe pour nous dire ce qu’il fallait étiqueter ou ne pas faire. C’était un temps où nous pissions contre les églises. Cette odeur pourtant n’avait pas de vrai attrait. Il était bien plus intéressant de regarder des balcons du troisième étage – entre des bouffées de vertige – le remplissage d’une citerne et le contremaître qui montait sur la citerne quand elle était pleine et qui versait par la trappe sur son dos le contenu d’un seau de cuivre que l’on imaginait être la touche de dieu dans ce délice des anges qu’est le vin, même de table.

     Mais dans le couloir de droite, le nôtre, celui des escaliers et de la cour intérieure, derrière une porte vitrée en bois il y avait l’autre odeur, l’odeur de l’imprimeur Guirles, l’odeur de l’encre et des produits de nettoyage des plaques et des caractères en plomb. Parfois l’odeur de la colle des reliures, et toujours l’odeur du papier.

     Il n’y a pas deux papiers qui ont la même odeur et on pourrait écrire un livre sur ces odeurs dont je ne sais plus parler qu’en anglais, car je n’ai jamais su en parler en français, car je n’en ai jamais parlé de ces odeurs dans la langue de l’école, car une odeur ça se sent, ça s’hume, ça ne se dit pas. Mais disons qu’il y a l’odeur froide des papiers d’emballage marron, l’odeur grise du papier journal, l’odeur douce et sucrée des papiers de livres, l’odeur chaudes des grandes affiches.

     Et l’odeur de l’encre qui épouse celle du papier. Un délice. Un plaisir indicible. Le plaisir des unions contre nature, ou bien de nature mais toujours bâtardes d’une pulpe cellulosique et d’un fluide.

     Parfois je poussais la petite porte de l’imprimerie dans le couloir et je me retrouvais nez à nez en face du massicot si grand et gros qu’il semblait être une mâchoire de dragon. Vers le devant de l’atelier ouvrant sur le quai, les tables de finition des travaux, reliure, mise en liasse, vérification de la qualité, emballage et expédition. Et de l’autre côté vers la cour centrale le vrai atelier avec les rotatives elles aussi énormes et les machines à imprimer qu’on appelle des presses, comme celle de Gutenberg en son temps.

     Contre le mur des casiers légèrement obliques avec des centaines de petites cases qui contiennent les caractères en plomb. L’odeur du plomb. Il avait pour moi une odeur sombre, de nuit glacée et pourtant avec au cœur de chaque petit caractère un feu secret.

     Devant ces casiers un long établi sur lequel étaient posés des plaques qui allaient servir à l’impression. Quelques fois j’allais jusque là et regardais ces trucs, ces assemblages de lettres que je ne savais pas lire. Un ouvrier m’expliqua un jour que les lettres étaient à l’envers et de droite à gauche. Mystère des mystères de toutes les inversions.

     Un rêve sans pareil que ces portes qui s’ouvrent et se ferment dans le cerveau quand on parle d’inversion. L’enfant y voyait des portes de placards noirs qui s’ouvraient à l’envers, mais qu’est-ce que c’était que l’envers, le sens inverse des placards de la cuisine ou de la chambre j’imagine ? Mais derrière ces portes inversées le mystère ennuité de l’inconnu. On a toujours besoin d’un inconnu dans nos petites cervelles. On court après l’inconnu parfois toute sa vie, comme dans la cour de récréation, et quand on lui tombe dessus, à l’inconnu, on se retourne et on fuit, et c’est nous qui sommes alors à l’envers, inversés, renversés.

     Mais ce couloir et cet atelier d’imprimerie, ce Monsieur Guirles avait un autre mystère que nous entendions parfois quand il faisait tourner la grosse rotative. Il était choriste au Grand Théâtre de temps en temps pour les opéras et son favori était la Damnation de Faust. Parfois il poussait une note ou deux de son air favori « La fleur que tu m’avais jetée… » et la basse continue de la rotative lui donnait le la ou le do, comme on pourrait dire.

     Ces bruits, ces odeurs, avaient un nombre. Quatre-vingt-quinze. C’était le 95 quai des Chartrons à mi-distance entre le Cours de la Martinique et son tram et le Cours du Médoc et son autre tram, chacun à deux pas des entrées principales du port avec leurs guérites, leurs douaniers, leurs flics qui vérifiaient les sacs des dockers, et en plus des passagers à celle du Cours du Médoc, du fait de la Gare Maritime située là.

     Le plus étrange et le plus surprenant dans ce monde ancien c’est que je sens ces odeurs comme si elles existaient encore, j’entends ces bruits depuis longtemps disparus avec le port, bien sûr, et avec le goudron qui depuis bientôt toujours recouvre les pavés, et avec les grilles finalement enlevées il y a quelques années, comme s’ils étaient encore là dans mes oreilles battant à mes tympans.

     Et pourtant ce qui ressort encore plus fort dans ces souvenirs ce sont les lumières et les mouvements. Des lumières qui changent avec l’heure du jour ou de la nuit, mais aussi avec les saisons et les fêtes. Les lumières des magasins et des vitrines. L’échoppe du cordonnier n’a rien à voir avec la boulangerie. Et pour Noël il y avait partout des décorations lumineuses de sereine confiance dans la nuit. Et ces lumières dansent à jamais dans mes yeux. Pourtant les mouvements, c’est encore pire. J’ai vécu ces mouvements comme la couche la plus puissante de la réalité et j’ai toute ma vie essayé de capter les rythmes différents et multiples de ces sensations entrecroisées.

     Je trouverai un premier exutoire à ces rythmes enchâssés avec le twist il y a longtemps, puis plus tard avec les rythmiques noires du rock et de l’Afrique. J’ai toujours essayé de suivre les rythmes de mes sensations et si possible d’aller chercher le rythme le plus profond et endiablé. Imaginez le rythme fébrile d’une rotative, ou le rythme ensorcelant d’un vin puissant, ou encore le rythme lourdement suave et liquoreux des voitures et des camions sur le quai qui s’entrecroisent tous avec le rythme céleste des grues qui tournent et virevoltent comme des aigles dans les nuages.

     Le Quai des Chartrons, le port de Bordeaux et les couloirs du 95 étaient des pistes de danse sur lesquelles j’essayais d’exceller simultanément et tour à tour. J’en ai fini tout tordu, biscornu, farfelu, mais peut-être heureux comme un paresseux maintenant que je ne peux plus guère que me déplacer au rythme imperceptible du sur place.





Monday, May 20, 2013

 

Le SNAC et la SAES en plein OPEN ACCESS


       


53ème CONGRÈ DE LA SAES – DIJON – 16-17-18 MAI 2013
CONFÉRENCE RECHERCHE : PIERRE MOUNIER, DIRECTEUR ADJOINT DU CENTRE POUR L’ÉDITION ÉLECTRONIQUE OUVERTE (CLÉO)

Dr JACQUES COULARDEAU


Sans entrer dans le détail historique de la dite conférence qui n’a eu que peu de discussion possible et qui, bien que présentée comme un sujet brûlant et contradictoire, n’a fait l’objet que d’une présentation partiale car du seul point de vue de l’orateur, je tiens à faire quelques remarques.

La SAES se serait honorée d’un débat contradictoire, d’une table ronde, d’une initiative bien plus prégnante. En plus la discussion ayant été réduite à dix ou quinze minutes, il n’était pas question d’ouvrir une quelconque boîte un peu complexe.

Le ou les cas mis en avant aux USA ne correspondent pas à la situation française, ne serait-ce que parce que la National Academy of Sciences n’a pas été citée. Elle publie des milliers d’articles de toutes le sciences en ligne et en open access tout en respectant le copyright américain. De même il n’a pas été cité les nombreux éditeurs scientifiques américains ou mondiaux à base américaine (ou parfois originellement européenne) qui pratique l’édition électronique, plus ou moins ouverte. Il n’a pas été cité le système SCRIBD qui permet l’échange de publications en open access. Il n’a pas été cité les sites académiques qui permettent cette mise en ligne en open acces, en particulier www.independent.academie.edu. Le tableau était partiel et partial.

Il faut aussi signaler que l’édition universitaire américaine est extrêmement dynamique et respecte les lois sur le copyright, et donc rémunère ses auteurs qui souvent ne sont pas de l’université concernée. Nous n’avons rien d’équivalent à aucune de ces institutions américaines bien que nous devons signaler que www.independent.academia.edu est ouvert au monde entier et à toutes les langues. Ce site est en open access mais n’est pas un éditeur et donc ne respecte pas les obligations que les éditeurs se doivent de respecter concernant le copyright et le paiement de royalties. La mise en ligne est faite par les auteurs et sous leur seule responsabilité.

Enfin l’orateur n’a pas signalé l’édition en ligne et dans un cadre commercial par Amazon au niveau mondial dans le cadre de sa liseuse et maintenant tablette Kindle : édition gratuite pour l’auteur, ne nécessitant pas un éditeur, Amazon n’étant que le diffuseur mais assurant un paiement de 70% de royalties sur le produit des ventes. Cette solution avait été largement mise en avant par certains auteurs aux journées récentes de la Société des gens de Lettres sur l’édition électronique, et depuis les éditeurs par l’intermédiaire de leur Syndicat National de l’Edition a accepté un accord avec le Conseil Permanent des Ecrivains et quelques autres organisation sur le contrat de l’édition virtuelle. Cela n’a pas été mentionné.

Le cas de la Grande Bretagne ne nous concerne pas non plus car les université d’Oxford et de Cambridge sont des éditeurs scientifiques mondiaux. Le débat autour de qui doit payer si la recherche des universitaires et des chercheurs britanniques est mise en ligne en open access ou pas est typiquement anglaise et ne nous concerne pas. On est en droit même de demander quel est le statut de telle ou telle université britannique, privée, publique, mixte. Ces concepts ne sont pas pertinents pour la Grande Bretagne dans leurs définitions française, et même américaine.

La vision ainsi réduite présentée par l’orateur ne permettait aucune discussion et le temps de toute façon manquait pour cela.

J’aimerais présenter ici quelques remarques sur des points abordés ou non.


DE QUOI LA RECHERCHE PÂTIT-ELLE EN FRANCE ?

Il a été impliqué que c’était de visibilité et d’accessibilité. J’aimerais insister sur quelques autres points préalables à toute discussion, au risque de fâcher.

1- les délais de publications quand les actes d’un colloque ou les chapitres d’un livre collectif sont publiés sont beaucoup trop longs. Le GERAS du temps de Michel Perrin publiait l’année suivante les actes de ses colloques annuels. Cela n’a pas du changer depuis qu’il s’est retiré. L’université Catholique d’Angers a mis environ un an pour publier les actes de son colloque sur la traduction. Le SARI a mis environ un an pour publier son manuel collectif sur la décolonisation. Les deux premiers cas sont papier. Le dernier est en open access et l’année compte de l’appel a contribution à la publication et donc contient le temps de recherche. Voir un article de 2009 sur la campagne électorale de Barack Obama de 2008 être publiée en 2013 semble plutôt surprenante. On pourrait citer d’innombrables cas où les délais sont de 4 ans ou plus.

2- La recherche française pâtit d’un manque de lisibilité internationale du fait de son attachement que je qualifierais de fétichiste à la langue française. Ce n’est pas une langue universitaire au-delà de la France et de ces anciennes colonies (et encore pas toujours ou pas uniquement pour celles-ci). Ce n’est pas une langue internationale qui a un statut approchant ni de près ni de loin l’universalité. Tous les auteurs Américains sont très fiers d’être traduits. Les Français se font une gloire d’être publiés en Français et même qu’en français. Je me souviens de la sortie en séance d’ouverture de Louis Guespin à l’Université Laval pour le XVème Congrès International des Linguistes de 1992, interpellant Claude Hagège qui prononçait la conférence d’ouverture en anglais l’accusant au Québec, lui Français, d’oser parler anglais dans ce congrès international. Avons-nous vraiment changé depuis 1992 ? Nos publications en français seraient comme un enregistrement de nos cours en ultrasons. Pire encore cela nous empêche de participer aux débats internationaux et même nous rend dépendants de traductions, souvent fautives d’ouvrages étrangers. Je me souviens de l’ouvrage « The End of History » de Fukuyama mal traduit par « La fin de l’histoire » alors que le sens est « la finalité de l’histoire », même si dans son dernier chapitre Fukuyama retombe dans le mythe marxiste d’une société future où la démocratie et la liberté seraient totales et où l’histoire s’arrêterait. Ce sens de finalité est beaucoup plus faible dans le mot « fin » que dans le mot « end » et bien sûr ceux qui n’ont pas lu le livre en anglais se eont laissés aller à la vision d’un monde sans problèmes, sans classes et sans histoire.

3- La sélection par des pairs est particulièrement fautive. Si sélection il devait ou devrait y avoir cela devrait être fait par des commissions de lecture indépendantes et donc de spécialistes non universitaires, au moins pour une bonne partie. Comment se fait-il que quelqu’un qui a participé à tous les colloques du GERAS avec une communication publiée dans les actes tous les ans, dès Michel Perrin retiré voit sa proposition pour le colloque suivant refusée et découvre rapidement que son email a été supprimé de la liste des envois automatiques. Est-ce un choix par des pairs ? Y avait-il un passe-droit avant ou y a-t-il une herse après ? Et de toute façon la démocratie et la liberté exige que les avis des lecteurs soient nominaux et publics et que les auteurs concernés aient un droit d’appel. Je me demande ce que font les associations et organismes de lutte pour et de protection des libertés fondamentales.
Aux Editions du temps dans le cadre des volumes de préparation à l’Agrégation consacrés a Shakespeare, tant qu’ils furent dirigés par Maurice Abiteboul certains auteurs ont pu tous les ans proposer un chapitre. Dès que Maurice Abiteboul s’est retiré, ces auteurs ont été écartés. Est-ce une question de qualité ou une question de personne ?
Un appel a contribution est lancé. Une proposition est envoyée, et est acceptée par le comité de sélection. La contribution envoyée (si c’est pour une simple publication) ou encore effectivement présentée (si c’était un colloque avec publication ultérieure) est refusée pour publication avec des raisons on ne peut plus oiseuses. Si c’est en anglais c’est relu par des intégristes expatriés britanniques qui décident que « a lot older » n’est pas acceptable et doit être remplacé par « much older ». Ou bien la contribution est jugée excellente pour sûr mais n’entrant pas parfaitement dans le cadre du projet. Pierre Mounier a défendu le système en prétendant que cela permet d’approfondir des axes de recherche. Il me semble que trop souvent on n’a pas d’approfondissement, encore moins d’élargissement, mais simplement un enfermement. La recherche française pâtit de son manque d’ouverture.


LA RECHERCHE ET LA PUBLICATION

1- Le compte d’auteur de la célèbre défunte Pensée Universelle a trouvé des formes nouvelles d’existence. Vous vous inscrivez à un colloque et les droits d’inscription vous permettront de recevoir un exemplaire des actes : vos droits d’inscription sont en quelque sorte pour les communicants un compte d’auteur déguisé. Si les communicants sont exemptés, alors les droits d’inscription sont une souscription obligatoire. Le compte d’auteur c’est l’auteur payant. L***N (ils sont sensibles à la critique dit-on) pratique cela couramment : les auteurs doivent assurer une vente dûment payée à prix libraire d’un certain nombre de volumes. J’ai connu et rencontré des auteurs qui devaient trouver un niveau de subvention donné pour un volume. Le Syndicat National des Auteurs et des Compositeurs a accompagné les auteurs plaignants contra L***N il y a déjà longtemps sur le fait qu’il ne payait aucun droit d’auteurs en dessous de mille exemplaires vendus. Les tribunaux l’ont forcé à baisser ce nombre. Mais cinq cents est absurde puisque d’une part il tire le plus souvent en dessous de ce nombre et en flux tendu, c'est-à-dire que s’il a signé pour cinq cents, quand il mettra l’ouvrage aux orties il en aura peut-être effectivement fabriqué cent ou cent cinquante. Le compte d’auteur c’est l’enfer de l’édition.

2- L***N pratique une autre forme en demandant aux organisateurs d’un colloque ou à une institution comme un département universitaire de prendre en charge l’achat à prix libraire et la vente d’un certain nombre de volumes. Outre le flux tendu de juste avant qui permettra à L***N de fabriquer au plus une cinquantaine d’ouvrages en plus de ceux pris par l’institution, on a là exactement le système britannique proposé par le rapport Finch. Et on serait prêt à aller manifester aux Invalides bien sûr vue la validité de notre requête contre ce rapport Finch, alors que nous pratiquons tous les jours cette même chose. Et bien sûr rien ne revient aux auteurs, sauf a commander ses propres exemplaires et les vendre si L***N veut bien en livrer je me souviens d’un ouvrage de Maurice Abiteboul mis en vente par L***N sur Amazon.fr et qu’Amazon.fr n’a jamais été capable de me livrer et m’a finalement après plusieurs mois déclaré que l’ouvrage était indisponible.

3- Le Freemium. Pierre Mounier a proposé sa solution. Il s’agit uniquement d’Open Access. L’auteur ne paie rien. L’institution derrière l’auteur ne paie rien. Il ne s’agit que de revues qui sont portées par des associations ou des unités de recherche rattachées à des départements universitaires. Tous les utilisateurs en Open Access ne paient rien, mais les bibliothèques et autres utilisateurs institutionnels qui vont télécharger la revue paieront une somme modique, incitant ainsi à ne pas lésiner sur ces abonnements. En un an l’organisation Open Edition de Pierre Mounier a collecté ainsi 100,000 euros qui ont alors été redistribués aux diverses revues concernées. Mais rien n’est revenu aux auteurs.

4- Dans les trois cas il y a eu spoliation des droits de l’auteur garantis par la législation internationale sur le copyright ou la législation française sur le droit d’auteur. Dans le premier cas il paie. Dans le deuxième cas il doit diffuser ou il ne touche rien. Dans le dernier cas il ne touche rien. Tôt ou tard il faudra que les auteurs, sur la base des traités de l’OMPI saisissent au niveau mondial l’OMC pour pratiques commerciales illicites. Je ne peux que souhaiter que ce jour arrive et que je le voie. J’ai été de ceux qui ont bataillé pour que l’URSS et ses satellites puis la Chine qui ne respectaient pas le droit d’auteur ou le copyright et n’étaient ni signataires des traités de l’OMPI (Notons que les USA ont été très longtemps dans cette situation jusqu’à Bill Clinton) ni membres de l’OMC pour voir enfin le jour où le cas de l’URSS a été réglé de façon radicale et le cas de la Chine a été réglé de façon négociée. Aujourd’hui l’Europe lance une bataille contre la raison et la propriété intellectuelle d’un domaine particulièrement productif sans vouloir considérer les conséquences éventuelles. L’histoire fera le nécessaire : soit on sombrera dans la stagnation par fuite des cerveaux. Soit on devra reconnaître – un peu tard il est vrai – nos erreurs et les corriger. Quand à récupérer les cerveaux perdus, ce sera une autre affaire car les deux solutions interviendront l’une après l’autre et ce sera la fuite des cerveaux qui entrainera d’ailleurs le mea culpa de l’Europe.




ARGUMENTAIRE SUR LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE
CONCERNANT LES PROJETS EIROPÉENS D’OPEN ACCESS OBLIGATOIRE POUR LA RECHERCHE BÉNÉFICIANT DE FONDS PUBLICS

Dr JACQUES COULARDEAU

1- La propriété intellectuelle est une, personnelle et indivisible même si elle couvre deux domaines différents bien que similaires car étant tous les deux la réalisation de la créativité humaine :
a- l’artistique, le littéraire et la pensée spéculative générale ou appliquée des auteurs de toutes sortes.
b- l’industriel et le scientifique des inventions et des inventeurs.

2- Le droit d’auteur (patrimonial et moral), le copyright et les brevets sont des droits de l’homme fondamentaux, de tous et de chacun, à contrôler et bénéficier de son/leur travail intellectuel tout en faisant bénéficier la société des produits de ce travail intellectuel.

3- La propriété intellectuelle, sous toutes ses formes, est devenue le moteur de l’économie du savoir et de la société du savoir pour lesquelles le savoir et donc la propriété intellectuelle sont des moyens de production directs.

4- Ce savoir doit être à la fois partagé dans sa circulation dans le public concerné et protégé dans sa détention par son/ses auteur(s) ou inventeur(s) dans le cadre des traités OMPI et des pratiques de l’OMC.

5- Seule cette protection  peut assurer la pérennité des savoirs minoritaires et la diversité partagée. L’absence de protection entrainerait une loi du marché sauvage qui signifierait la mort à terme rapide de toutes les créativités, pensées ou/et cultures minoritaires par la disparition des créateurs qui produisent ces cultures minoritaires qu’elles soient techniques, scientifiques, spéculatives, artistiques ou culturelles.

6- L’exception culturelle doit être redéfinie comme la diversité pérenne protégée de la pensée et de la créativité humaine.

7- Les technologies modernes et à venir de « virtualisation » (qui n’est en rien une dématérialisation) des produits intellectuels et de leur circulation ne changent rien à la question. Si on veut à la fois un haut niveau de créativité et un haut niveau d’impact économique et social il est indispensable d’inciter tous et chacun à découvrir et accéder sans cesse plus aux œuvres de la créativité humaine et à développer sa/leur propre créativité. Cela implique la circulation la plus large possible

8- Mais il ne peut pas y avoir de créativité véritablement innovante et donc enrichissante pour la société si les créateurs et inventeurs ne peuvent pas bénéficier de leurs œuvres et inventions en vue simplement d’en vivre grâce à une protection et rémunération en fonction de la circulation et de l’utilisation de leurs œuvres et inventions. Sans ces moyens vitaux fondamentaux la créativité innovante deviendrait un vrai privilège seulement permis à ceux qui n’ont pas besoin de cette activité pour vivre.

9- L’Open Access ne change en rien ces principes. Il permet la circulation mais on doit veiller à la protection des droits de l’homme fondamentaux des créateurs, penseurs et inventeurs et à la rémunération de leur contribution à la créativité sociale et économique. L’open Access doit de plus être un choix libre et non une obligation.

10- Si les institutions et les financeurs publics veulent rendre obligatoire cet Open Access à ceux qu’ils financent ils doivent réaliser que cela doit être dûment inscrits dans les contrats liant ces institutions et les créateurs, chercheur et inventeurs qu’ils prennent sous contrat, ce qui reviendrait à priver  ces personnes de leur propriété intellectuelle, et ils doivent également réaliser qu’ils créent ainsi une logique de compétitivité faussée qui poussera les meilleurs créateurs, chercheurs et inventeurs vers le domaine privé où ils seront rémunérés en fonction des utilisations des œuvres et inventions dont ils détiennent la propriété intellectuelle.

11- Cela devrait sans faillir amener les entrepreneurs privés dans et autour de la recherche à exiger que la loi, le Code de la Propriété Intellectuelle, soit modifiée pour leur donner le même privilège sans contreparties pour les auteurs, créateurs, chercheurs et inventeurs. Cela reviendrait à imposer en Europe le statut de copyright le plus extrême, car dans les pays de copyright comme les USA et la Grande Bretagne, les auteurs de la chose écrite et imprimée conserve leur copyright. Dans la situation créée par cette nouvelle logique, même eux perdraient ce droit.

12- Le raisonnement proposé pour la « recherche » une fois accepté n’a aucune raison de ne pas être étendu à tous les domaines de la circulation des œuvres de l’esprit qui reçoivent des fonds publics : le théâtre, la musique, le cinéma, la télévision, la radio, les musées, et la liste n’a pas de fin, sans compter le risque qu’une telle pratique impliquerait : ne plus produire avec des fonds publics dans la perspective d’une mise en ligne en Open Access que des œuvres ne pouvant entraîner aucune protestation d’un segment quelconque du public, en d’autres termes une forme d’autocensure.


Contacts
SNAC - 80, rue Taitbout - 75009 Paris - Tél : 01 48 74 96 30 - snac.fr@wanadoo.fr - www.snac.fr
Dr Jacques COULARDEAU - 8 rue de la Chaussée - 63880 OLLIERGUES - 04 73 95 59 17 - dondaine@orange.fr - http://drjacquescoulardeau.blogspot.fr/ - http://independent.academia.edu/JacquesCoulardeau
Document à consulter :




Commission Européenne/Communiqué de Presse

Données scientifiques: le libre accès aux résultats de é d'innovation en Europe (EXTRAITS)

Commission européenne     Communiqué de presse

 
Bruxelles, le 17 juillet 2012
[…] Les publications et les données scientifiques issues de la recherche financée par des fonds publics seront accessibles plus rapidement à un plus large public, ce qui permettra aux chercheurs et aux entreprises de les exploiter plus facilement. […] À partir de 2014, tous les articles produits avec l'aide de fonds de ce programme devront être mis à disposition en libre accès:
·                     soit immédiatement par l'éditeur, qui les publiera en ligne (approche dite de la «voie dorée»); les coûts de publication engagés pourront être remboursés par la Commission européenne;
·                     soit par les chercheurs, six mois au plus tard après la publication (12 mois pour les sciences sociales et humaines), via des archives libres d'accès (approche dite de la «voie verte»). […] seuls 25 % des chercheurs rendaient leurs données librement accessibles. […]
·                     élever au rang de principe général d'«Horizon 2020» le libre accès aux publications évaluées par les pairs, soit par la publication en libre accès («voie dorée»), soit par l'auto-archivage («voie verte»); […]
·                     aider les chercheurs à remplir leurs obligations en matière de libre accès, et promouvoir une culture du partage. […]
               



PARLEMENT EUROPÉEN
19.3.2013                                                                      B7-0000/2013
PROPOSITION DE RÉSOLUTION (Extrait)
déposée à la suite d'une déclaration de la Commission
conformément à l'article 110, paragraphe 2, du règlement 
sur les négociations en matière de commerce et d'investissement entre l'Union
européenne et les États-Unis d'Amérique (2013/2558(RSP))
Vital Moreira, au nom de la commission du commerce international


Mandat de négociation
[…]
11.        souligne que l'accord doit englober une protection solide des droits de propriété
intellectuelle (DPI), y compris la protection des indications géographiques; considère que d'autres points de divergence dans le domaine des DPI devraient être levés, conformément aux normes de protection internationales; […]
  
LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE RELÈVE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE COMME TOUTES LES ŒUVRES DE L’ESPRIT ET CETTE PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE EST À LA FOIS LE MOTEUR DE LA CIVILISATION ET DE L’ÉCONOMIE.
À CE TITRE ELLE SE DOIT D’ÊTRE PROTÉGÉE
TOUT COMME LES DÉTENTEURS DE CETTE PROPRIÉTÉ
ET LEURS AYANTS-DROIT.
 
 

Position de la Coalition française sur la feuille de route 
relative au projet d’accord transatlantique (Extrait)

 […] La Coalition française et les Coalitions européennes sont très activement mobilisées auprès de leurs gouvernements, du Parlement européen et de la Commission afin que le mandat prévoie expressément une exclusion des services audiovisuels et autres services culturels du champ des négociations transatlantiques.
Nous considérons que, dans cette perspective, la communication du document politique rédigé par les professionnels et les Ministères concernés dans le cadre du groupe de travail du MAEE serait très utile. […]


18/03/2013                            Communiqué de presse
ACCORD DE LIBRE-ÉCHANGE UNION EUROPÉENNE / ÉTATS-UNIS
L'ÉTAT FRANÇAIS MOBILISÉ POUR LA DÉFENSE DE L’EXCEPTION CULTURELLE


La Coalition française pour la diversité culturelle se réjouit des déclarations du président de la République, François Hollande, et de la ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filippetti, appelant à la défense de l’exception culturelle dans le cadre des négociations commerciales entre l’Union européenne et les États-Unis.
En soulignant la nécessité d’exclure expressément les services audiovisuels et cinématographiques des négociations qui devraient s’engager d’ici cet été, le président de la République et la ministre de la Culture et de la Communication le rappellent avec raison : il ne s’agit pas de secteurs comme les autres.
Cette volonté ferme des pouvoirs publics français est d’autant plus utile que la Commission Européenne a adopté cette semaine un projet de mandat de négociation extrêmement inquiétant pour l’exception culturelle.
Malgré l’opposition d’Androulla Vassiliou, commissaire en charge de la Culture, et de Michel Barnier, commissaire au Marché intérieur, le Collège des commissaires a malheureusement laissé la porte ouverte à ce que les services audiovisuels et cinématographiques puissent faire l’objet d’engagements de libéralisation.
La Coalition française pour la diversité culturelle s’insurge contre ce double renoncement de la Commission européenne : renoncement à soutenir l’exception culturelle alors même que l’Europe a été le terreau sur lequel le combat pour la diversité culturelle s’est forgé ; renoncement à respecter la Convention de l’UNESCO de 2005 sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, pourtant ratifiée par l’Union européenne.
Face aux États-Unis qui voudront soutenir au mieux leur industrie audiovisuelle, aujourd'hui leur second poste d’exportation mondiale, la Commission européenne joue un jeu dangereux qui consisterait à faire du secteur culturel une monnaie d’échange et à fragiliser l’ensemble des politiques de soutien à la création audiovisuelle et cinématographique.
La Coalition française pour la diversité culturelle espère que ces prises de position fermes de l'État français seront de nature à rallier d’autres États soucieux de ne pas baisser la garde face à un projet de mandat qui fait fi de la préservation de l’identité culturelle européenne, du dynamisme de la création européenne et du potentiel économique des industries culturelles.
Pour Pascal Rogard, Président de la Coalition Française pour la diversité culturelle, « la position actuelle de la Commission européenne rélève du cynisme et de la schizophrénie : après s'être félicitée en grande pompe en 2006 de la ratification par l'Europe de la Convention de l'UNESCO pour la diversité culturelle, la Commission est prête aujourd'hui à enterrer les principes de l'exception culturelle pour complaire aux milieux d’affaires. » 



A propos de la Coalition française pour la diversité culturelle

Créée en 1997 contre l’A.M.I. (accord multilatéral sur les investissements négocié à l’OCDE), la Coalition Française pour la Diversité Culturelle – anciennement connue sous le nom de Comité de vigilance pour la diversité culturelle – rassemble près de cinquante organisations professionnelles de la culture (cinéma, télévision, spectacle vivant, édition, musique, arts graphiques et plastiques et multimédia) et défend la diversité culturelle face aux négociations commerciales internationales.

La Coalition coordonne les objectifs que veulent défendre ensemble les professionnels auprès des pouvoirs publics français, européens et internationaux  notamment la défense de la capacité des Etats à mettre en place, à développer et à adapter leurs politiques culturelles, tous secteurs confondus, le maintien de la culture en dehors des accords de commerce internationaux et des engagements de libéralisation dans le cadre de l’OMC, la mise en œuvre de la Convention UNESCO de 2005.

La Coalition française assure la coordination des actions menées au nom des Coalitions européennes pour la diversité culturelle (Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, France, Irlande, Hongrie, Italie, Portugal, Slovaquie, Suède, Royaume Uni ainsi que la Suisse) et elle est membre fondateur de la Fédération Internationale des Coalitions pour la Diversité Culturelle (FICDC), créée en septembre 2007, qui regroupe 43 Coalitions issues de tous les continents et représentant au total plus de 600 organisations professionnelles de la culture.





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