Friday, June 21, 2013

 

L'Opéra de Pékin est un monument tout neuf par Paul Andreu

L’OPERA DE PEKIN – XU CHENGBEI – PEKING OPERA, THE PERFORMANCE BEHIND THE PAINTED FACES – 2010

Le sujet est fascinant mais le fait qu’il soit traduit en français à partir de la traduction en anglais et non à partir du texte original en chinois, fait que des tournures anglaises se glissent ici et là, voire même des erreurs de traduction. Et pourtant c’est un petit livre introductif capital pour cet art mal connu en Occident, mais les orthographes variables des mots chinois, jamais donnés dans leur caractères chinois eux-mêmes, fait que l’on a quelque difficulté à suivre le propos, par exemple le personnage générique masculin est-il « shen » ou « sheng » ?

Le livre insiste sur la tradition. Forme théâtrale qui s’est développée en premier dans les provinces et qui ensuite est montée à Pékin et s’y est installée, le livre cependant n’est pas assez clair sur une tradition qui a nécessairement plus de deux siècles d’existence car elle plonge ses racines dans des pratiques théâtrales beaucoup plus anciennes et pratiquées dans les foires, les marchés et les temples (que l’on imagine bouddhiste car ce n’est pas précisé) bien avant de se retrouver dans des salons de thé comme accompagnement théâtral des discussions et des dégustations, et avant même de devenir de vrais spectacles théâtraux.


Il serait aussi bon de savoir quels furent les contextes sociaux et culturels qui ont produit cette forme artistique. Quelques éléments sont donnés avec le Roi des Singes et « Le Pèlerinage vers l’Ouest » de Wu Cheng'en du XVIe siècle. Mais une telle forme littéraire épique a nécessairement des racines dans des traditions orales anciennes, beaucoup plus anciennes.

Mais le livre insiste sur le caractère familial de ce théâtre traditionnel, chaque troupe étant formée autour d’un grand acteur et maître et ce maître puisant dans sa famille des membres supplémentaires qui se consacrent au théâtre dès l’enfance. Le livre insiste aussi sur le fait qu’un acteur ne peut devenir un grand que dans la mesure où il commence sa formation très tôt, bien avant l’adolescence, et qu’il se spécialise très vite dans l’un des quatre grands rôles de ce théâtre, chaque grand rôle générique ayant des sous-catégories : « sheng » (homme adulte), « dan » (femme), « jing » (visage peint) et « chou » (bouffon). Il est bon de noter que tous les rôles peuvent être tenus par des hommes et que la promotion des femmes est récente, tout comme l’interdiction de la vente des enfants aux compagnies théâtrales par leurs parents.


Le livre insiste sur la difficulté de survie de ce théâtre dans le monde actuel, dans sa forme de théâtre vivant du moins. Le livre note en passant que le CD et le DVD ont transformé la présence de cette forme artistique dans la société, y compris internationale, sans compter la télévision, le cinéma et la radio en ordre anti-chronologique. Il serait bon d’insister un peu sur ce fait.

Traditionnellement ce théâtre associe quatre formes d’art : le chant, le récitatif, le mime et le combat. On notera que le récitatif est plus important que le chant quand les deux formes sont présentes. Les pièces mettent l’accent sur une des quatre formes, rarement toutes. Alors que le décor et les accessoires sont très peu nombreux sur scène, le maquillage, les costumes et la codification de la gestuelle sont des formes très élaborées, sans parler bien sûr du chant et du récitatif, donc du langage mis en musique, qui eux aussi sont fortement codifiés.


La révolution culturelle a eu un impact lourd sur cette forme artistique en interdisant les pièces traditionnelles et en mettant en avant un répertoire « révolutionnaire » de paysans, d’ouvriers et de soldats de l’Armée Populaire autour d’événements de la révolution maoïste, et ce sous la direction de la dernière épouse, puis veuve de Mao Zedong de 1966 à 1976, période qui finira avec l’élimination d e la « vande des quatre » non mentionnée dans le livre.

Le livre signale le renouveau de cet art mais n’insiste pas suffisamment sur justement ce renouveau tant dans la formation que dans les formes et les sujets et préfère insister sur le public vieillissant et la nostalgie en particulier pour les pièces révolutionnaires de la révolution culturelle.

Un bon livre d’initiation pour ceux qui ne connaissent que peu ou pas cette forme théâtrale.


Dr Jacques COULARDEAU



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